C'EST TROP BIEN L'AMERIQUE! Moi, quand ma maman elle a dit qu'on allait là-bas, bah j'ai trouvé cool. Parce que c'est le pays de Disney. Alors je me suis dit que si j'allais là-bas, et bien je pourrais devenir une vraie princesse. Après, je veux pas d'un prince, ils sont pas drôles les princes. J'veux juste un château et des licornes. Et pas de méchante sorcière, ça ferait des problèmes et puis on a pas besoin de se compliquer la vie avec des problèmes en plus. Moi, j'ai cinq ans, et j'ai déjà beaucoup trop de problèmes comme ça. J'aime bien quand les gens vieux ils disent que plus on grandit, plus on a des problèmes. Moi, je pense qu'ils oublient juste les problèmes qu'ils ont eu. Parce que des dents qui poussent, c'est bien plus problématique qu'une panne de voiture. N'importe quel enfant vous dira la même chose. Les adultes, ça a oublié les dents qui poussent, et du coup, ça croit que ça n'existe pas vraiment comme problème... Mais moi je ne serais pas un adulte comme ça, parce que je serais une princesse disney sans méchante reine, et du coup, bah je pourrais pas avoir de problème. Sauf les princes. Je veux pas de princes, mais j'ai déjà un problème à ce niveau-là. Il ne faut pas en parler hein. Si jamais Sweeney il sait, il va trop se moquer de moi. Il serait même capable d'aller tout raconter à Calvin. Calvin, c'est son copain. Il nous en avait déjà parlé mais là, il l'a ramené pour la première fois à la maison. J'ai peur qu'ils se rendent compte de quelque chose alors je me suis faite discrète au départ. Et puis je me suis dit que ça me ressemblait pas. Alors j'ai décidé que je pouvais bien aller voir Sweeney même s'il voulait avoir la paix. Il m'a ramené aussi vite à la porte. J'suis restée assise à la porte pendant cinq minutes, et puis j'en ai eu marre. Certes, il a le visage d'un ange, pourrait fort bien être mon futur mari un jour, quand je ne serais plus une princesse mais une reine du coup... Enfin voilà, il a beau sembler être l'homme de ma vie, c'est pas pour autant que je vais l'attendre sagement derrière une porte. Après un soupir résigné, j'suis retournée dans ma chambre en courant pour dessiner des trucs. Quoi? Des trucs. Ça vous regarde pas d'abord. Et puis après, quand j'en ai eu marre, bah j'suis allée embêter Eion. Lui, il avait carrément pas d'excuses pour me mettre dehors. Alors il m'a laissée sauter sur son lit pendant qu'il faisait ses devoirs. Ça a l'air trop nul l'école, ya des devoirs. Et puis maman elle nous a appelés pour le goûter. Et je me suis retrouvée entre Eion et l'autre prince. Et voilà que, alors que j'essaie de me concentrer sur mon gâteau pour ne pas dévisager l'autre, ya mon frangin qui me donne un coup de coude dans les côtes. « Qu'est-ce qui t'arrive Ginny? T'as perdu ta langue aujourd'hui? » Je vois son sourire moqueur et respire un grand coup pour ne pas rougir. Une princesse, ça sait rester de marbre. Et puis il m'énerve! Ginny c'est même pas un diminutif valable d'Imogène! Je sais pas où il les trouve ses idées trop naze, mais il devrait savoir où les mettre! A la poubelle! « Tu veux je te dise quoi? On m'a dit de pas parler aux idiots, ça risquait de les instruire... » Ça le fait rire et il abandonne alors que je lève le menton d'un air fier. Ya Calvin qui rit aussi. C'est une petite victoire Imo. Je plante ma fourchette avec entrain dans ma part de gâteau. Si je lui fais bonne impression, il sera pas déçu quand il apprendra qu'il doit se marier avec moi un jour plus tard. Ouais, parce qu'il aura pas le choix, je serais une princesse, c'est moi je déciderais.

 

J'me suis faite toute belle aujourd'hui. J'ai demandé à maman de me faire ma jolie coiffure qu'elle me fait pour les grandes occasions. Elle m'a demandé pour quoi c'était mais j'ai pas voulu lui dire, alors elle a haussé les épaules en rigolant. Et puis j'ai demandé conseil à Eion. J'aurais pu demander à Sweeney, mais Sweeney, il a que douze ans, il connaît pas vraiment la vie encore. Alors voilà, j'suis allée demander à Eion ce qu'il fallait faire pour qu'un garçon il veuille bien être mon amoureux. Il s'est moqué de moi en me disant que ça suffisait que je sois une princesse. Je me suis énervée, et quand je l'ai menacé de considérer que Sweeney était meilleur conseiller en le domaine, il a finit par essayer de me trouver des astuce. Quand même. C'est pas franchement dur de les manipuler ceux-là, mais quand même. Faudrait pas qu'ils me forcent à user de ruses aussi faciles. Ils pourraient me donner ce que je veux quand je le demande... Enfin, c'est sûrement pour me préparer à la vie. C'est ce que Sweeney il dit des fois. Il dit que quand je serais une vraie personne (il dit que c'est quand je ferais plus d'un mètre vingt), et bien les gens seront plus aussi gentils avec moi. Moi j'y crois pas trop, si je suis toujours une princesse aussi adorable, les gens seront toujours gentils avec moi, ils auront pas le choix. Je sais bien qu'il n'y a plus trop de vraies princesses aujourd'hui, mais si je me comporte comme une princesse, les gens me traiteront comme une princesse. Sinon, mes frères ils s'énerveront. Ils aiment bien m'embêter mais j'crois qu'ils considèrent qu'ils ont un monopole sur la chose. Enfin bref. J'ai mis mes plus jolis vêtements. Mais maman elle a pas voulu je lui pique du maquillage. Elle a dit que j'étais trop petite et qu'à huit ans, on se maquille pas. Et maintenant, il faut que je me lance à l'eau. J'attrape sa manche. « Zachary... Je peux te demander quelque chose..? » Il se tourne vers moi avec son air un peu stupide. C'est vrai qu'il est pas magnifique comme Calvin, mais j'sais pas, je me sens toute bizarre quand je le vois. Si ça se trouve mon prince charmant à moi, c'est pas un Apollon... « Mmh..? » Je tords mes doigts et j'inspire un gros coup. Oui, c'est ma technique pour éviter de ressembler à une pivoine. C'est joli, les pivoines, mais j'préfère éviter. « Tu... euh... Tu voudrais bien être... Mon... Amoureux? » Il tord la bouche dans une grimace qu'à l'air un peu ennuyée. « Euh... Désolé mais non. » Je reste un peu choquée, j'ai tout bien fait pourtant... Trop d'hésitations? Eion m'avait pourtant dit que les mecs aiment les filles timides... « Si tu veux, moi je peux être ton amoureux? » Son copain qui se tenait derrière m'adresse un sourire éclatant. Je le regarde de haut en bas alors que Zachary se retourne vers lui d'un air choqué. « Mais qu'est-ce que tu fous Ben? Tu étais d'accord avec moi que les filles c'est nul et ça sert à rien!! » Le prénommé Ben lui fait signe de se taire sans le regarder et me fixe en attendant ma réponse. Je hausse les épaule et lui tend la main avant de lui faire mon plus beau sourire. « Pourquoi pas? » Je suis un peu déçue quand même. Mais s'il veut pas de moi, et ben je vais lui faire regretter, et même que je vais monopoliser son copain. Pour l'instant je me contente de l'emmener par la main loin de ce goujat de Zachary. Enfin, c'est pas grave hein, je lui en veux pas vraiment. Mais Eion, il m'a dit que le premier garçon avec qui j'irais, il sera pas forcément mon prince charmant, que j'ai le temps avant de me "poser". Je sais pas trop ce que ça veut dire, mais ce prince là, il me plaît bien. Bon, il me fait pas des papillons dans l'estomac comme dans les livres, mais j'aime pas les papillons. Il me rend moins bizarre que Zachary mais il est bien plus joli, alors qu'est-ce que ça peut faire? Ce n'est pas franchement un prince, mais il a l'air gentil, alors il peut bien être mon amoureux. Je lui tiendrais la main et lui ferait des bisous sur la bouche. Mais pas trop comme les grands. Les grands, ils se bavent dessus, c'est sale. On est quand même pas des escargots.

J'ai du faire croire à Sweeney que je voulais ABSOLUMENT voir ce film d'horreur et que j'avais aucune copine pour y aller. J'ai peur qu'il se doute de quelque chose. Je veux dire, il sait pertinemment que je ne regarde jamais de film d'horreur. Parce que c'est très mal fait et que je suis une totale flippette. Alors j'ai joué la carte de l'adolescente foldingue et j'ai prétendu que c'était pour l'acteur principal. J'espère que ça passera et qu'il se doutera de rien. Enfin, vu comment Eion a ri comme un con quand il a su que j'avais réussi à convaincre le pirate... On voit tellement bien que ça dans mon jeu? Je pense qu'aujourd'hui moins. Malheureusement, je craque sur Calvin depuis bien trop longtemps. Ma fourberie n'était point aussi bien développée à l'époque. Et puis qui ne s'en doute pas. Si une jeune fille a un grand frère, elle aura forcément kiffé les copains de celui-ci. Alors pourquoi pas les copains d'Eion? Parce que j'en ai choisi un, et qu'ils en ont jamais ramené de plus beau depuis. En même temps, je ne suis pas sûre qu'on puisse faire plus beau que ça. J'ai choisi le top du top dès le début. Vous étonnez pas que j'ai pas eu d'autre grand amour depuis. Hein? Zachary? Qui? Ah, le mec de quand j'avais huit ans? Non mais t'as cru, ça doit être mon premier amour, mais vous savez comment c'est ce genre de truc, on en garde toujours un vague souvenir assez drôle, mais ça passe plus vite qu'un rhume. Bref. Ne vous en faites pas, Calvin est toujours resté l'homme de ma vie. Si je tenais un journal intime comme ce que les séries semblent m'inciter à faire, je parlerais surement de lui une page sur deux. Bon, sur trois. Parce que ma vie est quand même passionnante au delà de mes trucs débiles d'adolescente éprise. J'ai même des vrais copains. Mais bon, quand je rêve d'un mec, c'est souvent du même quoi. Moi? Obsessive? Je ne vois vraiment pas ce qui vous fait dire ça. Enfin, je n'ai pas de journal intime, et au delà du fait que ça ne m'intéresse pas, c'est surtout qu'avec des frangins comme les miens, ça resterait pas intime très longtemps. C'est mieux caché si ça reste dans ma tête. Personne n'a besoin de connaître les vraies raisons qui m'incitent à aller au cinéma voir un film de merde aujourd'hui. Ils peuvent s'en douter, ils n'ont pas besoin d'en avoir la confirmation. Voilà tout. et vu que j'ai un talent INIMAGINABLE, j'ai réussi à laisser passer Calvin avant moi au cinéma et voilà, il se retrouve entre moi en mon frangin. Du coup, je suis obligé de me coller à lui et de cacher ma tête dans son épaule, et de m'agripper à son bras... Franchement, pour un peu, ça en ferait le meilleur film que j'ai jamais vu. D'ailleurs j'en suis pas grand chose au scénario, mais bon, on connaît tous ce genre de film, c'est pas comme si le scénario était franchement d'une grande importance... Hein? Et putain, qu'est-ce qu'il sent bon ce con. J'aime les parfums de mec. Faites pas genre c'est malsain, toutes les hétéros et tous les gays font pareil, j'suis pas dupe. Quand le film est fini, j'peux pas m'empêcher d'afficher un léger sourire débile. Sweeney me lance un regard de travers avant de soupirer. Il se penche vers Calvin pour lui susurrer un truc à l'oreille. Vas-y, fait le malin parce que c'est ton pote, tu peux tout te permettre. Il essaie sûrement de le mettre en garde contre sa foldingue de sœur, surement. Et voilà Calvin qui fait un grand mouvement en arrière et le regarde, genre ébahi. « Non mais t'es dingue?! Essayer quoi avec ta frangine? C'est comme ma petite sœur! » Je m'efforce de garder mon sourire, imperturbable. Non, mais c'est pas comme si je m'en doutais pas hein. J'me suis accrochée à lui pendant deux heures et il est resté parfaitement innocent. Je sais bien qu'il ne me voit pas comme ça... Pour mon plus grand malheur. Enfin, ça m'a empêchée de profiter de ces deux heures. Merde, j'men fous de ce qu'il en pense, c'était MON moment. Enfin, s'il insiste, j'peux lui amener nos actes de naissance, j'suis sûre que j'ai aucun lien du sang avec lui. Pas qu'on soit moche chez les Callaway, juste qu'on a pas un tel bellâtre. Ceux que j'ai suffisent déjà à faire kiffer mes amies, mais elles les auront jamais. Pas tant que j'aurais pas Calvin. Non mais oh.

Pas le courage de choisir un mec pour la soirée. Pas le courage de devoir faire semblant d'avoir envie d'aller avec l'un d'eux en particulier. Pas envie de laisser un pauvre naze croire qu'il avait la moindre chance. Soyons honnêtes, j'irais avec le roi du lycée. Parce que je serais reine. Vous verriez cette robe. J'ai fait tous les magasins du coin pour la trouver. Un vrai bijou. En parlant de bijou, j'ai le collier et les boucles d'oreilles assorties, magnifique. Moi qui voulait être une princesse je suis servie. Allez seule au bal de promo? J'crois que j'ai rendu ça hype ce soir. On y va entre copine, on se permet de choisir sur place. C'est tellement mieux de faire son shopping quand ils sont tous bien habillés. Choisir celui avec qui sa tenue s'accorde. Je ne sais pas comment les mecs l'ont pris. J'espère qu'ils n'auront pas trop honte de ne pas avoir de fille à venir chercher. Ils feront avec. Mon père a un peu râlé de devoir nous emmener et les frangins ont aussi affirmé que ce n'était pas normal... Mais je crois que c'est juste qu'ils étaient tellement dégouté de ne pas avoir pu jouer au très connu moment où la donzelle s'apprête et où les mâles terrifient le prétendant. Tant pis pour eux. Je leur en ramènerais des mecs, pas un seul, ils n'auront qu'à les effrayer le lendemain, au petit dej, quand il sortira de mon lit. J'aimerais bien voir ce qu'ils oseraient alors dire... Mais ce n'est pas pour tout de suite. Ce soir, c'est juste le bal de promo, le plus beau soir de ma vie à ce qu'on dit. Et j'ai tout fait pour que ça le soit. Les filles m'ont assuré que je ne pouvais qu'être la reine. Et je les crois. On est pas dans un film, yaura jamais une pauvre fille paumée qui se fait belle pour le jour J et qui me vole la place. « Les filles? Il est l'heure d'y aller! » Mon père nous appelle d'en bas des escaliers. Tenant ma robe dans une main pour descendre les escaliers sans me prendre le pieds dedans, mes talons dans l'autre main, je me précipite. C'est rare que je sois vraiment prête à l'heure, mais aujourd'hui, maman avait régler mon programme à la seconde près. Les filles me suivent et on enfile nos chaussures pour la traditionnelle photo avant le départ. Maman arrête pas de sourire. Elle s'est occupée de nous toutes et elle a l'air tellement fière d'elle. C'est aussi pour ça que c'est tellement mieux d'y aller entre filles. On se comprend, on fait toutes les mêmes efforts. Un mec, ça se lave et ça fout un costard et basta. Aucune innovation. N'allez pas croire que pour autant j'opterais pas pour un mec pour un slow. Mais soyons honnête, s'il faut parler, ils ont guère de discussion. J'ai rien contre le fait qu'ils confondent mes seins avec mes yeux, mais s'ils pouvaient sortir quelques mots parfois, ça serait appréciable. Enfin, tant qu'ils font ce que je veux, je vais pas trop leur en demander. Avant que je passe la porte, Sweeney qui passait par là nous siffle d'un air admiratif. Je lui fais signe de la fermer. Il a pas intérêt de draguer mes copines celui-là. Qu'il aille dormir avec Cap'taine avoine et qu'il me fiche la paix. Je l'entends gueuler à Eion de regarder par la fenêtre alors qu'on s'en va vers la voiture. Ca ne fait ni une ni deux, ya le deuxième gogol qui nous siffle depuis sa chambre. Je lui fais un signe peu délicat en faisant entrer mes amies avant moi dans la voiture. Avant de rentrer, je lui gueule d'aller se toucher sur ses magasines plutôt. Je le vois qui rigole alors qu'il referme sa fenêtre et que je m'enfourne dans la voiture à mon tour. Je tapote sur l'épaule de mon père. C'est parti pour la meilleure soirée de toute ma vie, la plus mémorable. La soirée qui fera de moi une reine. Tu peux être sûre que cette tiare, je vais la gagner et je la garderais toujours. C'est un peu comme si mon rêve de petite fille devenait réalité. Ou un truc du genre. C'est la gloire, comme je l'aime. C'est ça d'avoir un complexe de princesse.

Je crois que c'est ce que l'on appelle l'homme idéal. Déjà, un homme qui me paie le restaurant part avec des bons points. Quand il a de ces abdos, j'ose même pas vous dire combien il en gagne. Nous avons ici la parfaite combinaison entre le mec maigre et le mec musclé. Tout pour plaire. Et voilà qu'en plus, il baise comme un dieu. Soyons honnête. J'en aurais presque des fourmis aux doigts de pieds. La joie, la perfection. Ça doit être lui l'homme idéal dont j'ai tant entendu parler. Pour la peine, je suis restée traîner dans son lit. Pas le courage de quitter cet endroit plein de bonheur, de plaisir, de perfection... Je deviens gaga? Si peu. Je profite de l'instant présent, voilà tout. Mais à un moment, je finis par renoncer à faire ma loque, enfile la première chemise à lui que je trouve et découvre son appartement de jour. Pas mal. Il est riche en bonus... A-t-il seulement un défaut? Je le retrouve installé tranquillement sur son canapé, torse nu, à jouer à un jeu vidéo quelconque. A quoi, je m'en fiche un peu. Si vous voulez du détail, ça doit être un truc de courses de voitures. Je remue mes fesses pour aller m'installer pour m'installer à côté de lui pouvoir toucher un peu ce torse qui paraît trop parfait pour ne pas être photoshopé. J'suis pas du genre à me mettre en couple avec les mecs comme ça, mais ça n'empêche pas de vouloir apprécier un réveil tranquille après une nuit aussi géniale. Il m'interrompt cependant assez vite. « Tiens, tu pourrais me faire un sandwich? Et faudrait pas que tu restes trop tard, j'ai des potes qui viennent mater un match à l'appart. A moins que tu veuilles aller nous acheter des bières... » Je le regarde, totalement neutre... Et je vois à son air qu'il ne blague pas. Et bien comme quoi, on les trouve vite les défauts. Je ne me départi pas de mon sourire des plus charmants. « Pas de problème mon beau. » Je me lève aussitôt du canapé pour aller m'habiller. Un détour par la salle de bain, je fouille dans l'arrmoir à pharmacie et trouve ce que je voulais. La vengeance est un plat qui se mange froid, et ça tombe bien, les sandwichs aussi. Je soupire doucement. J'ai vraiment un problème. Je choisis toujours les plus gros connards. Quoi que celui-ci atteint des sommets encore jamais explorés. Jveux dire, mon niveau de connard habituel, c'est juste coureur de jupon qui s'en fout de ma gueule. Mais étant donné que c'est généralement réciproque, je m'en fous. Ils ont la décence de pas attendre de moi que je fasse la moindre chose pour eux. Il faut bien que je lui enseigne la vie à celui-ci. Que je lui montre que toutes les meufs qu'il baise ne devienne pas immédiatement des connes à son service. Certes, le sexe était cool, mais ce n'est pas comme si ce n'était que de son fait hein. Allez, j'suis prête, j'ai tout ce qu'il me faut, plus qu'à faire un détour par sa cuisine. Je trouve sans trop de mal le pain, la mayo, le jambon. Un sandwich tout ce qu'il y a de plus simple. Plus l'ingrédient secret. Je pourrais aussi cracher dedans, mais il risquerait de s'en rendre compte. Je pose mes quelques sandwichs œuvres d'art sur une assiette que je lui apporte pour la poser sur sa table basse. « J'espère que tu en auras assez. » Il regarde l'assiette avec une moue dubitative mais acquiesce. « Je vais y aller alors. » « Ouais, j't'appellerais. » Il n'a pas mon numéro pas plus que mon prénom, mais il le sait très bien, et je préfère que cela reste ainsi. Une fois partie, j'espère qu'il ne me retrouvera pas de sitôt. Il risque de ne pas apprécier d'avoir passer ce match aux chiottes. D'autant que j'ai versé de l'eau sur ses réserves de papier toilette, cela risque d'être fort gênant. Je tapote la petite fiole de laxatif que j'ai vidé dans la mayonnaise et ne peux m'empêcher d'afficher l'air le plus ravi du monde. On me l'avait bien vendu l'homme parfait, mais j'aimerais autant que ce ne soit qu'un coup d'un soir, comme les autres. Je ne voudrais pas d'ennuis quoi. Pas trop en tout cas.

   

Une bonne couette et nous voilà toutes deux plus qu'à l'aise dans le canapé. Certes, il manque un chocolat chaud et des chips... Pour le moment. On vient de finir notre goûter de 19h, alors faudrait peut-être pas pousser non plus. Oui, c'est tard pour un goûter, mais je vous expliquer, hier on a fait le marathon Lord of the Ring. Non, non, ça veut pas dire qu'on a décidé de prendre le rythme de repas d'un hobbit, ça veut juste dire que vu l'heure à laquelle on s'est couchées, on s'est pas franchement levées tôt et du coup, on est un peu en décalé maintenant pour gérer les repas. Mais c'est pas trop grave. C'était notre week-end glandouille, et du coup, c'est le dimanche de récupération avant de reprendre une vie normale et pourrie, avec des cours et tout. Alors on s'est mis une émission de télé-réalité quelconque et on rigole comme des bossues en critiquant tout ce qu'on voit. Enfin, je critique beaucoup et ça la fait rire surtout. Faut bien avouer que je suis plus langue de vipère qu'elle. Elle est trop discrète cette fille, trop gentille. C'est sûrement pour ça que ça a été le coup de foudre direct. J'ai tout de suite vu que je pourrais en tirer quelque chose d'intéressant. Ouais, elle a pas eu à attendre longtemps pour savoir si je voulais d'elle comme coloc. J'aurais pu lui faire une déclaration d'amour aussi vite. Étonnamment, elle semble avoir trouvé qu'une abrutie comme moi était tout aussi parfaite comme coloc. Surement parce qu'avec sa tendance à pas assez croire en elle, il faut bien quelqu'un pour lui rappeler que, si je l'apprécie, c'est qu'elle fait partie des meilleurs. Hey, je choisis pas n'importe qui pour traîner avec moi non plus. Ou peut-être un peu, mais bon, chut. Bref. On regarde cette émission débile au concept un brin éculé où une blonde se voit courtiser par un paquet de gros looser. Charlie a quand même osé me faire remarquer que je pourrais participer. Moi. Bon ok, mais juste parce qu'il y en a que c'est tellement des loosers qu'ils l'appellent princesse et que je trouve ça ridicule mais que ça me ferait kiffer. Oui, c'était mon truc quand j'étais gamine, mais ça a pas disparu comme ça du jour au lendemain non plus hein... Bref. Je sais que j'adorerais, mais bon, pas trop non plus. Genre 24h. Après, je le mettrais des coups de tatanes pour qu'ils me foutent la paix et qu'ils aillent harceler une autre donzelle. Enfin, là n'est pas la question. Encore faudrait-il que j'auditionne pour ces conneries, et ça me saoulerait direct. Donc bon. Pas de chances que je m'y retrouve. Tiens, en parlant de looser au fait. « AU FAIT! Je t'ai pas dit? J'ai rencontré un mec à mon cours de photo! Arrogant comme pas deux, ça me donne envie de lui foutre des baffes. » Elle laisse passer un moment sans me répondre au cas où je voudrais ajouter quelque chose, mais je suis pensive en repensant à cette étrange rencontre. « Et tu voudrais te le faire. » C'est même pas interrogatif comme ton. Je crois qu'après quatre mois de coloc, elle commence à me connaître par cœur la brave petite. Je lui adresse un sourire éclatant. « Faut avouer qu'il est quand même à un autre niveau que ceux-là... » Je désigne le groupe de geek à la télé qui semble être en train de préparer une surprise à leur blondasse. Tant de mecs pour une seule fille. A un moment, elle doit vraiment plus savoir quoi en faire. « C'est pas comme si tu mettais la barre très haute là... » « Mais je suis SÛRE que tu l'as déjà croisé sur le campus. Un brin, une gueule de branleur parfait qui fait genre j'suis trop dark et j'aime pas les gens! » Elle a l'air un peu perdu. Elle doit chercher un mec du campus correspondant à la définition mais elle ne semble pas trouver. « Mais si, toujours à se trimballer avec un appareil photo. Un cul d'enfer. Un sourire trop irritant. On dirait presque moi au masculin tellement il est pédant! » Et ça la fait rire. « Je ferais attention demain, j'ai bien envie de voir combien un toi au masculin est canon. » « T'en fais pas, c'est plus du canon là, c'est du beau-gosse top niveau. » Je m'interromps. Ouais, ma classification est vraiment trop naze. « Enfin, n'exagérons rien hein, il n'a rien d'un dieu pour autant. J'me dis que ça doit être son rictus de sale petit con qui gâche tout au tableau. Comme si Aragorn se baladait en faisant un nez de cochon en permanence. Tu vois? » Elle a l'air pensive et hausse les épaules. Bon, même en faisant des grimaces, Aragorn reste un dieu, c'est ça? Ok. Un dieu un peu sale, mais j'accepte. Enfin, elle a capté l'idée je pense. « Alors, tu prévois quoi comme technique d'approche? » J'inspire un grand coup. Parce que c'est là que ça devient compliqué. Non, je n'aborde pas simplement les mecs pour leur demander de baiser avec moi. Je m'arrange pour qu'ils pensent que c'est leur idée. C'est toujours plus facile comme ça, ils le prennent mieux. La preuve, Zachary, c'est l'un des rares que j'ai abordé comme ça, de but en blanc. Certes, on avait 6ans, mais ça n'a franchement pas marché n'empêche. Donc voilà. J'lui ai pas demandé de coucher avec moi, juste d'être mon amoureux, mais c'est une démonstration qui marche, parce que c'est moi qui décide. Maintenant, laissez-moi réfléchir en paix pendant que j'expose mon diabolique plan à celle qui garde tous mes secrets, mon journal intime vivant, la meilleure des colocataires.

Et me voilà en retard et tout ça c'est de la faute d'Eion qui a trouvé le moyen d'arriver à l'improviste. Du coup, j'ai passé une bonne demi-heure à m'enthousiasmer qu'il soit de retour, à faire semblant que de rien n'était, à m'engueuler avec lui pour la moindre connerie possible... Et au lieu de mon habituelle demi-heure de retard, j'en ai une heure entière. Heureusement, Ariel sait très bien que je suis chiante et jamais là quand il faut, elle ne m'attends jamais. J'me suis contentée de lui envoyer un message dix minutes avant de partir pour savoir où la retrouver. Et c'est en bar. Comme c'est étonnant. Alors hop, j'ai sauté sur mon vespa et j'ai foncé vers cette destination habituelle. La mise en garde comme quoi yaurait sûrement le mec chelou qui l'avait abordé le SEUL moment où je l'avais laissée seule je ne sais plus quel jour? Comme si ça allait me faire peur. Si cet homme que, malgré le manque d'enthousiasme d'Ariel, je pense magnifique, n'attend que de me rencontrer, ça ne fait aucun doute. Sans moi, aucune chance qu'il réussisse à la choper la jolie rousse. Enfin, avec moi, yen a pas plus, mais il a intérêt de le croire. Comme ça, il sera gentil avec moi aussi. Ahum. Non, en fait. Je m'en fiche de ce qu'il en pense, je veux juste voir l'énergumène. Même si Ariel n'est malheureusement pas le genre de fille à aller discuter, les yeux brillants, de combien il est beau et de combien on pourrait lui en faire baver avant qu'elle accède à ses demandes... Quoi que là, elle avait l'air de penser à un truc intéressant. Je suis sûre que ça va bien finir pour une fois. Oh, pas pour leur couple hein, couple qui ne risque pas d'arriver, ou peut-être quand je serais devenue une grand-mère boiteuse. J'espère être quand même encore en vie pour voir ça. Mais non, ce qui va bien finir, c'est pour moi. Ariel va avoir une idée à la con, elle avait ce ton l'autre jour au téléphone. Ce ton qu'elle a quand les idées débiles commencent à germer dans son esprit... Reste seulement à savoir ce que c'est. Tout ce qu'elle m'a dit, jusqu'ici, c'est qu'il semblait prêt à faire tout ce qu'elle pouvait lui demander. Vas-y ma belle, joue de ton pouvoir magique. OUI! C'est un pouvoir magique! Encore mieux que les X-men. BREF. J'ai l'impression que mes pensées s'égarent mais je viens de garer mon splendide scooter devant le bar, je range le casque dans le petit espace sous le siège, je mets l'antivol et après un bref mouvement de main dans les cheveux pour leur redonner leur insolence naturelle, je suis prête à aller découvrir à quoi ressemble le doux dingue qui a décidé qu'Ariel serait sa proie. Il en faut peu dans le crane pour choisir Ariel. Pas qu'elle soit moche, juste que quand elle vous dit non, on sait que c'est non. Et pas non, mais je sais pas, peut-être si tu insistes. Je rentre et fouille rapidement la pièce du regard. L'avantage, avec Ariel, c'est qu'on la repère vite. Le problème, c'est ce que je vois à côté de sa chevelure de feu. Je connais cette tête. J'en suis sûre. Persuadée. Je ne lui ai jamais parlé depuis mes huit ans mais ça ne m'a pas empêché de le recroiser de temps en temps pour constater avec plaisir qu'il ne faisait plus aucun papillon dans mon ventre. J'en avais même fini par conclure que je devais être juste malade quand j'ai pensé que j'étais amoureuse de lui. Ça peut arriver à tout le monde une indigestion. Bref. Jamais parlé depuis qu'il m'a dit non, mais ça m'a pas empêché de le voir grandir, vite fait, sans jamais trop m'attarder sur son cas. Parce qu'il ne faisait certainement pas partie des personnes pouvant m'intéresser, pas plus que ses amis. Faut croire qu'on grandit tous. Je respire un grand coup et m'empresse de les rejoindre, l'air neutre. Allez Imo, oublie que tu l'as considéré comme le premier homme de ta vie. C'est pas comme s'il était beau de toute façon. D'une certaine manière, ça m'emmerderait franchement que ce soit lui, le relou qui drague mon amie... Mais je rencontre alors un sourire plein de dents qui me salue et me dit s'appeler Eric. Je sais alors que, cette fois-ci, c'est la bonne pioche. Pas à m'inquiéter d'une jalousie totalement malvenue et infondée. Voici le prince de ma Ariel. Je salue tout le monde, commande mon martini arrachant par la même occasion un rire à peine dissimulé d'une blonde bouclée qui sirote une bière. Je hausse un sourcil prête à la toiser... Mais en fait non. Ce qu'elle pense de ce que je bois, peu m'importe. Quand je la coucherais au tequ'paf, elle saura qui c'est le boss. Oui. Ça finira surement par arriver. Ça finit souvent comme ça, avec les gens qu'on rencontre dans des bars non? Je constate avec surprise que nous sommes au final plutôt bien entourés. Pas trop de tête de loosers. Au final, Zachary sait se faire des amis qui en valent la peine... Quoi que non. Je sais très bien que c'est simplement moi qui ai baissé mes standard. Je laisse Eric me faire le tour de table, me présenter tout le monde. Je fais comme si tous les prénoms étaient nouveau, comme si je ne connaissais personne. Ça passe comme une lettre à la poste.

Assise sur le lit, j'me refais le vernis des pieds vêtue d'une simple chemise. D'où elle vient? Bonne question. Certainement pas de celui qui m'a aidé à foutre ces draps en vrac, Link est pas assez classe pour que j'aille lui piquer ses chemises. Peut-être une que j'ai volé à un de mes frangins. Eux, au moins, ils ont du goût. Ou bien c'est moi qui les leurs achète. Parce que je ne peux pas permettre qu'un Callaway jette la honte sur notre nom. Déjà que le pirate est con, faudrait pas qu'il soit pouilleux en bonus. Sauf si c'est pouilleux façon Jack Sparrow... Ouais, mais il a beau y croire, il ne débarque pas de Pirates des Caraïbes. J'ai beau dire, quand il ne m'entend pas, qu'il est top canon, il y a des limites quand même. Faudrait pas qu'il prenne la grosse tête. C'est pas comme s'il mettait de l'eye-liner non plus. Et toute les filles savent que l'eye-liner, ça change tout. Contrairement au vernis sur les ongles de pieds couleur vert canard que je suis en train de poser. Mais non, le maquillage, c'est pas fait uniquement pour que ça se voit. C'est fait pour se faire plaisir à soit même. Et l'avantage du vernis à ongles sur les pieds, c'est qu'on peut réussir les deux côtés de la même façon. Contrairement au vernis sur les mains qui donne toujours l'impression que ma main droite a été peinte par quelqu'un atteint de Parkinson. J'avoue, j'trouve souvent quelqu'un pour me faire mes ongles de mains. Mais j'ai enfin finit mes pieds. Je ferme le pot et le pose sur la table de chevet avant d'admirer mon travail avec satisfaction. Ça, ce sont de jolis pieds. Oui, je suis souvent fière de moi, mais si je ne le suis pas, qui le sera pour moi? Faut bien aimer ce qu'on fait quand on le fait bien. Et il n'y a pas que me vernir les ongles que je fais bien, celui qui squatte ma douche pourrait vous confirmer mon talent dans d'autres domaines... Mais évitez d'en parler trop fort. Je dis ça pour votre bien hein, mon frère viendrait vous péter les dents s'il vous entendait essayer de me faire passer pour la dernière des salopes. En parlant de casser des dents, il reste bien longtemps dans la douche l'autre débile. Je m’assois sur le bord du lit et regarde l'heure. Ouais. Longtemps. J'espère qu'il ne se touche pas en pensant à sa grognasse. Un soupire m'échappe. Personne ne reste aussi longtemps sous la douche sans faire quelque chose du genre, soyons honnête. Et il n'a pas besoin de le faire en pensant à moi, vu que je suis dans la pièce d'à côté... Donc il pense forcément à elle. Dans ma douche. Le salaud. La salope. Quoi? Elle a rien fait? Mais bien sûr. Je l'ai vue lui faire les yeux doux. Il n'y a certes pas marqué propriété de Imogène Callaway-Ferguson sur son front, mais ça n'empêche qu'il est à moi pour le moment parce que je l'ai décidé. Je vais d'un pas léger jusqu'à l'évier de la cuisine où j'allume l'eau chaude à fond. Juste quelques secondes à attendre et un cri suraigu retentit dans mon appartement m'arrachant un léger sourire mauvais. J'ai dérangé quelque chose peut-être? Et quand je vois Link à moitié rincé sortir de la salle de bain avec son air paumé, je ne peux retenir un léger rire. Moi? Sadique? C'est pas comme s'il l'avait pas mérité. Je le regarde, l'air faussement innocent. Je n'essaie même pas de trouver une sale excuse, il sait pertinemment que j'ai fait exprès. Et il sait aussi pertinemment qu'il méritait cette douche froide pour avoir eu des pensées impures dans ma douche. Du coup, il n'ose pas trop gueuler et je finit par lui sourire avec une certaine satisfaction. Il sait qu'il a tort, et que j'ai raison comme toujours. Il finit par retourner finir de se rincer. Oui, il va sûrement se barrer en boudant, mais c'est pas comme si c'était franchement inquiétant. Il finira par revenir quand il aura envie de tirer son coup, le petit con. Un homme faible vous dis-je.

Ohlala, j'ai trouvé une perle avec celle-là. Quand je l'ai vue, j'y ai d'abord pas cru. Franchement, elle est parfaite pour lui. Si, si, je vous assure. D'ailleurs il a pas le choix, c'est moi qui décide. Je fais un grand signe à mon frère qui vient d'arriver au bar. Oui, il nous arrive de boire ensemble. Non, ce n'est pas glauque du tout, on arrive à se tenir quand il faut, et puis on rigole vraiment bien. Faut pas croire, mais il a beau être con, c'est un grand comique mon frangin. Et puis je l'ai déjà dit, je les préfère débiles. Il y a bien une raison à ça. C'est comme quand on dit aux enfants qu'ils aimeront quelqu'un qui ressemble à leurs parents. J'aime les mecs qui ressemblent à mes frangins. N'y voyez rien d'incestueux, je fais pas dans ce genre de truc sale. Rien que l'idée me donnerait envie de vomir. J'suis une princesse, je mérite mieux qu'un pirate. J'aurais été Elizabeth, je peux vous dire que j'aurais épousé le commodore Norrington moi. Pas un pauvre naze qui forge des trucs pourris. BREF. Sweeney pose ses grosses fesses sur le tabouret de bar à côté du mien. Il jette un coup d’œil moqueur au magnifique cocktail qui me fait face et je me contente de lever les yeux au ciel. Il faudrait qu'ils arrêtent tous de se croire supérieurs avec leurs bière. C'est comme si quelqu'un se moquait de moi parce que je mange du foie gras alors que lui se tape un sandwich au jambon. Oui, c'est une très bonne comparaison. Sauf que la bière, c'est moins bon que le jambon encore. Je ne bois pas QUE pour me bourrer la gueule mais aussi pour divertir mes papilles. Voilà tout. Et quoi de mieux pour ça qu'un cocktail de jour, préparé par ce barman à qui je fais de l’œil depuis quelques mois et qui ne me dit jamais ce qu'il met dans mes verres parce que j'aime les surprises. Et il a du talent, sinon, j'aurais bien vite oublié les cocktails du jour pour retourner à ceux, plus sûrs de la carte. Alors c'est à moi de regarde la pinte dégoutante que mon frère s'est commandé d'un air goguenard. « Qu'est-ce qui t'arrive Imo, t'es en avance aujourd'hui... » Il me regarde en faisant semblant de sincèrement s'inquiéter pour ma santé et je me contente de lui tirer la langue et d'afficher mon habituel air de peste pour qu'il voit bien que tout va bien. Il faut que je le mette en confiance, il faut que je mate la bête. Non parce qu'après ses déboires amoureux, l'idiot s'est persuadé que l'amour c'est pas pour lui et qu'il est mieux célibataire à "butiner" comme disent certaine pour pas faire trop glauque. Mais butiner c'est glauque. Sauf quand c'est moi. Et puis moi, c'est différent. Je sais que je finirais par trouver l'homme idéal quand je serais vieille. Genre quand j'aurais 45ans. Et que j'aurais plus le choix : soit me marier, soit me mettre à la chirurgie esthétique.  Je serais une magnifique cougar, je vous prie de le croire. En tout cas, l'idée est que moi, je ne butine pas. Je profite de ma jeunesse et me prépare ainsi à être encore plus parfaite pour l'homme idéal. Lui, il n'y croit plus. Il croit qu'il sera toujours aussi sexy avec sa barbe mal rasée. Il croit qu'il fera son Hugh Laurie. C'est sans compter sur moi pour le remettre sur le droit chemin de l'amour. Parce que je l'aime quand il est con, mais je l'aime aussi tellement quand il fait son romantique timide. Il était tellement mignon avec Bijou... BON. Ça a mal fini, je sais merci, pas la peine de remuer le couteau dans la plaie. J'ai retenu la leçon. Il faut se méfier des donzelles qui ont des prénoms chelous. Voilà. Mais celle-là, elle est sérieuse, elle a un bon travail, elle est veuve et elle a un nom tout ce qu'il y a de plus innocent. Celui de la reine d'Angleterre. Bon, c'est vrai, j'suis pas franchement sûre que la reine d'Angleterre soit l'innocence incarnée... Mais son prénom en tout cas si. C'est moi qui décide alors chut. « Ravie de te voir aussi! Tu es en retard par contre, comment ça se fait, tu étais avec ta copine? » Non, ce n'est pas un faux moyen pourri détourné de m'assurer qu'il n'a pas de copine. Enfin, il me regarde d'un air surpris et tombe dans le panneau. « Euh, j'ai pas de copine, j'étais avec... » Calvin, je sais. Je m'en fiche, je ne le laisse pas finir sa phrase. « Pas de copine? Oh, mais ne soit pas si triste mon pauvre frérot d'amûr, je t'ai dégoté une nana... » Je pince les lèvres dans une petite moue appréciatrice. « Une perle. » J'allais dire un bijou mais hum. La gaffe. Du coup, j'ai évité ça de justesse. Tiens d'ailleurs, il était avec Calvin, et il l'a même pas ramené. Certes, nos soirées entre frère et sœur sont entre frère et sœur mais il pourrait essayer de caser la fille qu'il aime le plus au monde avec l'homme qu'il aime le plus au monde. C'est ce qu'on fait quand on est un frère attentionné. Bon, à part que je lui ai jamais vraiment dit que si je vendrais surement toute ma famille si cela me permettait de coller Calvin dans mon lit. Chut. Il n'a pas besoin de savoir que sa sœur est une traîtresse. Il est question d'Elizabeth pour le moment. Et le regard de mon frère s'est illuminé. Il croit sûrement qu'il s'agit d'un de mes plans pourris ou il manipule une connasse pour la mettre dans son lit et lui briser le cœur. Oh, qu'il n'essaie pas. « Elle est blonde, elle s'appelle Elizabeth, elle est splendide... » Il fronce les sourcils. J'en parle pas comme je parle des connasses habituelles. « Mais tu veux pas que je te paie un mètre avant de te vanter tous les mérites de ma maître de stage? » Il écarquille les yeux. Oui, je viens d'apprendre que j'étais prise au stage que je voulais. « Mais il faut qu'on fête ça! » Je lui montre mon verre pour lui signifier qu'en quelque sorte, moi j'ai déjà commencé. Il fait signe au barman pour qu'il approche et lui commande du champagne. Sweeney qui boit du champagne, c'est drôle. Mais c'est une belle occasion. Après ce stage, j'en ai fini de mes études. Après ce stage, j'suis diplômée. Et puis je suis sûre qu'il veut détourner le sujet. Il sait que je suis une teigne. Si j'ai décidé qu'il devait finir avec une fille, c'est mauvais signe pour lui. Il va retrouver Imo en mode chieuse. Et si je veux pas qu'il fasse de conneries comme lui faire du mal, c'est encore pire.

J'ai l'impression qu'on m'emmène à un meeting top secret. L'autre dingue a insisté pour que je porte un foulard sur les cheveux et des lunettes de soleil. Elle avance en mode discret comme si on était dans un James Bond. Non, je ne fais pas EXPRÈS de faire claquer mes talons sur le bitume en la suivant... Ce serait trop fourbe pour moi voyons. Quand elle me lance un regard soupçonneux, je me contente de lui adresser mon plus beau sourire juste au dessus du foulard qui vient presque masquer le bas de mon visage et puis j'arrête mes conneries parce que je suis au bord du rire, et il faudrait pas qu'elle m'en veuille. Non, parce que depuis que je l'ai rencontrée, Norah, je l'adore, je l'adule. Elle est FAN.TA.STIQUE. Bizarre dans le genre, mais magique. Un peu comme la grande sœur que je n'ai jamais eu. Et du coup, on arrête pas de parler de tout et de rien. Contrairement à Ariel, l'autre à qui je parle de tout, Norah me répond plutôt que d'ignorer mes inepties. Et quand je lui ai parlé de Calvin, elle a plutôt réagit vivement. C'est le moins qu'on puisse dire. Elle a dit qu'elle allait lui botter le cul jusqu'à ce qu'il se rende compte que j'avais plus quatorze ans, si je me souviens bien de ses mots. Bref. Ça, c'était l'autre jour. Aujourd'hui, elle a débarqué en me disant qu'on avait un super rendez-vous que je ne pouvais pas louper. Après avoir tenté en vain de lutter contre son injonction de passer incognito, j'ai fini par me résigner et enfiler foulard et lunettes de soleil. Heureusement, la comédie finit bientôt alors qu'on entre dans un salon de thé un peu trop chic. Elle me voit regarder autour de moi avec l'air totalement con. « Personne ne pourra deviner qu'on se trouve ici, c'est tellement pas notre genre... Technique de pro, hein? » J'acquiesce lentement. J'voudrais pas la contrarier. On contrarie pas un agent secret, à ce qu'elle m'a dit. « Et je peux enlever... » Je désigne ma tête. Parce que je vais pas non plus me trimballer éternellement avec cet attirail ridicule. Je suis Imogène Callaway-Ferguson, j'ai un certain standing à tenir. Même au milieu d'inconnus. On sait jamais, je pourrais les connaître plus tard. Même si vu la moyenne d'âge tournant autour des cinquante ans, j'en doute... Mais ne présumons de rien. Norah hésite un instant et finit par acquiescer avec une moue un peu déçue. Elle a dit oui! Je me dépêche d'enlever les lunettes et le châle avant qu'elle ne change d'avis, et je m'installe à côté d'elle a la table qu'elle a habilement choisie en respectant surement des règles seulement connues des gens dans son genre. Non, pas des dingues, des agents secrets! Alors que je m'installe et que j'attrape la carte, je vois les yeux de Norah s'écarquiller et elle affiche un très grand sourire avant de faire de grands signes à un mec qui vient de rentrer. Enfin, mec... Le terme ne lui fait pas honneur. On pourrait dire le plus bel homme à quelques kilomètres à la ronde. « JOHNSON! T'es à l'heure dis-donc! Qu'est-ce qui t'arrive?! » Face à son air faussement inquiet, l'homme se contente de hausser les épaules pour porter son attention sur moi et me regarder de haut en bas. « Alors, c'est elle? » Je hausse un sourcil surpris alors que Norah acquiesce avec vigueur, les yeux qui brillent. Son copain laisse alors apparaître un large sourire. « Ça va totalement le faire ma poule! » J'attends un instant alors que Norah pousse un cri de victoire et que l'autre s'installe à la table sans plus trop faire attention à moi. Bon, il se passe quoi là, au juste? « Euh, on m'explique..? » « Ah! Excuse-moi! J'ai oublié qu'on était pas télépathes. Ma chère Imo, je te présente Tucker Johnson. Un abruti fini. » Le prénommé Tucker a l'air ravi du compliment et il adresse une semi-révérence à celle qui vient de l'insulter, comme pour la remercier. Je crois que je vais éviter de comprendre la logique. Il y a une règle à retenir quand on est avec Norah : oublier ce que "logique" signifie et se laisser porter. « Il est désormais missionné pour te draguer dès que Calvin sera dans les environs. Comme ça ton bellâtre débile finira par se rendre compte que tu peux très bien rencontrer des hommes de son âge. » C'est à mon tour de regarde Tucker de haut en bas. Ca, c'est sensé me draguer? Hum... Norah me regarde fixement pour avoir mon feu vert alors que Tucker semble être concentré sur la carte. Il marmonne quelque chose comme quoi "il n'y a pas de bière ici, c'est l'enfer sur terre?" et je ne peux m'empêcher d'afficher à mon tour un grand sourire. « Ça va totalement le faire ma poule. » Pour reprendre ces mots qui ne sont pas les miens. « VICTOIRE!! » La serveuse qui s'approchait de notre table pour prendre nos consommations semble hésiter à l'idée de s'approcher de ces dingues que nous sommes... Mais elle finit par oser. Et se retrouve à parler pendant trois ans avec Tucker qui, faute de bière, n'arrive pas à trouver ce qui pourrait être le meilleur sur la carte, considérant qu'on dirait bien là un plan du complot des vaches pour nous faire tous boire des chocolats chauds. Ou froids. Les fourbes.