life experiment N°1 : LOVE

   

Ariel 13 ans – Rédaction écrite en cours d’anglais – « En vous inspirant de votre vécu exprimez le sentiment amoureux. » - restera dans les annales comme étant le seul devoir ou la jeune Dwight n’a pas atteint la moyenne – cause : hors sujet.

« J’avais cinq ans. Il en avait six. Il s’appelait Edward. C’était un jeudi. Quand je lui ai demandé pourquoi il voulait que je sois son amoureuse, il m’a répondu : parce que tu es jolie.  Quand je lui ai demandé quelle était les implications liées au statut d’amoureuse, il n’a rien répondu.  En partie parce qu’il n’avait pas compris ma question, je suppose. Il a fini par m’expliquer qu’être son amoureuse consistait à faire comme les grands, à se tenir la main, à s’embrasser sur la bouche, et à être amoureux l’un de l’autre. L’absence manifeste d’information en sa possession sur ce sentiment qu’est l’amour m’a quelque peu dissuadée de m’impliquer d’avantage dans cette entreprise. Voilà. J’avais cinq ans et cela est, à ce jour, ma seule et unique expérience du sentiment amoureux.

Je pense cependant en avoir vu assez pour en comprendre sa nature profonde. Le sentiment amoureux est une construction sociale basé sur le principe d’imitation. L’homme se targuant d’être un être social doué de conscience, s’est construit une palette de sentiment lui permettant de se différencier des animaux. Le sentiment amoureux est sans conteste sa plus grande réussite puisqu’il parvient à faire croire aux masses qu’elles ne pratiquent pas le sexe dans le seul but de se reproduire mais pour exprimer cette chose noble et louable qu’est l’amour. Alors qu’en réalité nous ne valons pas plus que le chien en rut. Nous copulons dans le simple but de préserver l’espèce. Le désir sexuel – comme les sentiments qu’on lui a accolé – ne serve que notre instinct de procréation. Instinct qui est profondément incrusté dans notre ADN et ce depuis l’époque merveilleuse où nous n’étions encore qu’au stade de poisson dans l’océan.  Certains appelleront ça les biens faits de l’évolution. Je constat seulement que le poisson, lui au moins n’avait pas besoin d’arracher des fleurs pour parvenir à faire perdurer son espèce.
Cependant les enfants de six ans, gavés de propagande romantique, pense déjà que leur but dans l’existence est de trouver l’amour. Il y a donc fort à parier que les fleurs continueront à être déracinées.

Pour ma part, comme vous avez pu le comprendre, je ne porte que peu de foi dans cette grande mascarade qu’est le sentiment affectif, ma vision claire et précise de la supercherie m’empêchant sans aucun doute d’y accorder le moindre espoir. Ou peut-être que l’instinct de survie n’a pas trouvé sa place dans mes gènes. La vision de l’espèce humaine détruisant avec méticulosité tout ce qu’elle touche, ne me donne pas vraiment envie de mettre au monde des images miniatures de moi-même que je serais forcé d’aimer et d’élever pour qu’ils puissent, à leur tour, faire perdurer les erreurs des générations qui les ont précédés. Il ne peut y avoir aucun bénéfice dans ce procédé, ni pour moi, ni pour mes hypothétiques futurs enfants, ni pour le future de la planète. Et au vu des capacités non existantes de mon frère à parler au membre du sexe opposé, il y a fort à parier que la ligné Dwight s’arrêtera avec nous. Nous ne serons donc pas la cause d’une répétition sans fin de mensonge et d’erreur. Par choix pour ma part, par dépit pour mon frère. Mais dans quelle qu’en soit les raisons nous apporterons tous les deux notre part dans la lutte contre l’hypocrisie ambiante. »

   

life experiment N°2 : FAMILY

 

Ariel 8 ans – Extrait de son journal intime.

« Cher journal.
Aujourd’hui Luke est passé à la maison. Comme tous les jours. A croire qu’il n’a pas de famille et qu’il tente une incrustation lente et pernicieuse dans la nôtre. Pour ce qui me concerne, je suis prête à lui laisser Abu sans l’ombre d’un problème. Même si pour l’heure, je suis plus proche de devoir subir deux « frères » à longueur de temps que de me débarrasser du seul que j’ai reçu à la naissance. Comme quoi, la vie est injuste. Mais ce n’est pas ce dont je voulais parler pour le moment. Il se trouve que je suis entrain de lire ce livre tout à fait fascinant : Guerre et paix.  Il se trouve également qu’Abu et Luke se sont mis en tête de jouer à je ne sais plus quel jeu débile et sans intérêt qui, semble-t-il, nécessite de crier comme si on vous arrachait les parties génitales à chaque fois que l’on gagne ou que l’on perde. Notons également que les bruits provoqués par leur hurlement incessant n’aident en rien à la concentration nécessaire à l’appréciation pleine et entière d’un chef d’œuvre de la littérature.  Le contexte étant mis en place je vais pouvoir entrer dans le vif du sujet. Je suis allée voir les deux abrutis pour leur demander le plus poliment possible de faire moins de bruit. Si je me souviens bien les termes utilisé était : « hey les deux arriéré, ça vous tuerais de fermer vos  grande gueule, les gens dans cette maison qui sont doués d’un cerveau non limité aurait besoin d’un minimum de calme et de silence pour pouvoir se concentrer sur des choses qui ne nécessite pas la seul capacité d’avoir deux pouces opposable et qui en conséquence ne peuvent pas être accomplie par une bande de chimpanzé, ce qui n’est manifestement pas le cas de votre occupation actuelle. »

Cher journal je suis au regret de dire que malgré mon intervention pleine de diplomatie, les deux êtres primitifs qui squattent régulièrement notre salon ont refusé d’obtempérer. Je préfère préciser ce détail pour que tu aies bien conscience que la suite des évènements n’est que de leur entière responsabilité. Devant l’échec de la diplomatie, il m’a bien fallu avoir recours à d’autre moyen. Je suis donc revenue dix minutes plus tard pour annoncer à mon frère que Marie Stewart s’était présenté à la porte et qu’elle avait demandé à le voir. Pour préciser la situation il est important de dire que Marie Stuart est, pour reprendre les mots entendus dans la bouche de Luke, « putain de bonne »,  ce qui, dans leur langage primitif, semble vouloir dire qu’elle a des attraits féminins qui ne les laissent pas indifférent. Devant l’excitation évidente que cette nouvelle a provoqué chez les deux primates, je les ai informé que j’avais dit à la susnommé Marie Stuart d’attendre Abu près du chêne dans le jardin. Il a fallu trois dixième de seconde à Luke pour se précipité vers l’arrière de la maison et à peine plus à mon frère pour le suivre, rouge comme une tomate et tremblant comme une feuille.  Il me semble avoir entendu Luke me signaler qu’il n’y avait personne près de l’arbre pendant que je refermais la porte derrière eux et tournait le verrou. Je n’ai pas la moindre idée d’où ils sont allés finir la journée après avoir renoncer à essayer de défoncer la porte. Et en toute honnêteté je m’en moque complétement. J’ai pu finir ma lecture et prouver à tout le monde – ou du moins à moi-même- que les hormones étaient nuisibles à la réflexion intellectuelle. »

 

life experiment N°3 : SEX

 

Ariel 16 ans – Lettre envoyée à Marnie à Washington puis réexpédiée à Dallas, Chicago, Denver, Atlanta avant d’enfin atteindre sa destinataire à Los Angeles. Soit 3 mois après la première date d’envoi.

« Marnie ,
La raison me dit que les chances que cette lettre arrive à l’adresse indiquée sont aussi élevé que celle d’un enfant du tiers-monde de gagner au loto mais qu’importe. L’ordinateur de la maison étant toujours retenu en otage en plein milieu du salon et ne voulant pas prendre le risque que quelqu’un lise derrière mon dos, je tente l’envoi postale en espérant que tu restes suffisamment longtemps à la même adresse pour pouvoir la recevoir.
Mais venons-en au but. Tu as exigé d’être tenue informé de toutes mes études expérimentales sur le genre humain et je tiens mes promesses en t’envoyant cette lettre. Principalement pour être sûr que le monde garde quelque part une trace écrite de mes observations.  Qui sait, un jour certain d’entre eux retrouverons peut-être comment fonction leur cerveau et feront de mes recherches leur nouvelle bible. En attendant ce moment dans lequel j’ai sommes toutes peu d’espoir, je vais donc distraire ta monotone journée avec mon nouveau sujet d’études, j’ai nommé la copulation, autrement appelé coït, rapport sexuel ou plus simplement sexe. Tu connais, il me semble, mon aversion pour le concept qui stipule que l’acte sexuel est intimement lié au sentiment et plus précisément au sentiment amoureux. Ce n’est qu’un tissu de connerie inventé par je ne sais quel mormon surement au début du Moyen-Âge. Le sexe est purement mécanique, le plaisir et les sensations éprouvées sont dues aux caractéristiques du corps humain. Rien de plus à dire là-dessus. Il se trouve également que je fais – pour mon plus grand malheur – partie du genre humain et que donc, je suis soumise au même… désagréments physiques dirons-nous.  En d’autre terme j’ai 16 ans et comme la presque entière totalité de la population pubère, j’ai des hormones. Ce qui implique également des envies et des désirs purement charnels. C’est complètement irrationnel, ça me donne la gerbe de penser que mon corps me dicte ce que je ressens et désir, mais c’est un fait. Il semblerait que malgré mon intellect, je ne puisse pas avoir un contrôle absolu sur tout ce que je suis. Et puisqu’il n’y a rien que je ne peux faire contre ça, il m’a fallu analyser ses nouvelles données me concernant, comprendre ce qu’était le sexe et ce que cela avait à m’apporter. Et c’est ici que début la partie qui, je n’en doute pas, t’intéresse vraiment.

Le sexe nécessite malheureusement l’implication d’une tierce personne. J’aurais pu certes me contenter de n’importe quel décérébré hantant les couloirs du lycée mais les chances qu’ils éjaculent à la simple vu de mon soutien-gorge étaient trop élevé pour que l’étude soit réellement concluante. Non, il me fallait quelqu’un avec de l’expérience, histoire que je puisse objectivement décider si le sexe était quelque chose qui valait la peine d’être pratiquer. Tu me connais je suis une fille pleine de ressource et j’ai un frère qui, bien que passablement limite peu parfois s’avérer utile, enfin si ce n’est lui, du moins ses amis. J’ai suffisamment subit les histoires de Luke sur ses derniers exploit sexuels – quand il les racontait à Abu et que la cloison de ma chambre était définitivement trop fine – pour savoir qu’à moins qu’il ne soit un grand mythomane – ce qui reste somme toute une possibilité – il avait de l’expérience en la matière. Il ne me restait donc plus qu’à le mettre dans mon lit. Ou dans n’importe quel lit d’ailleurs. Par chance j’ai retenue de ma seule et unique expérience amoureuse à l’âge de cinq ans que je suis jolie. Supposément. Selon les critères de beauté en vigueur. Fait inutile la plus part du temps mais qui ici s’avère décisif.

J’ai donc emprunté une robe à Jodie. Et non, je ne lui ai pas vraiment dit dans qu’elle but, tu la connais, elle n’aurait surement pas validé l’idée. Mais elle était tellement ravie de me voir faire un effort pour quelque chose  qu’elle n’a pas trop insisté sur le pourquoi du comment. Enfin bref, il y avait cette soirée chez Lindsay Monaghan qui comportait le pack habituel : Alcool, drogue, genre populaires. Le trio gagnant quoi. On ne peut pas vraiment dire que j’étais à proprement parler invitée, mais d’un autre côté je lui ai permis d’atteindre la moyen en faisant son dernier devoir de math donc elle ne pouvait pas vraiment me laisser à la porte.  Luke devait être là pour je ne sais plus quelle raison, rien de très important. Et comme d’habitude il était entouré d’un harem de fille prête à lui jeter leur petite culotte au visage pour la gloire de se taper un joueur de hockey. Et non, je n’ai pas honte d’avoir fait partie de ce groupe le temps d’une soirée. Parce que mes raisons n’avaient rien à voir avec les leurs. Le fait que Luke sache tenir debout sur la glace sans se péter la gueule m’indiffère complètement. Enfin bref il m’a donc fallut me faire une place parmi elle. J’ai cru que Luke allait recracher son verre de rhum dans le décolleté d’une grande blonde quand il m’a vu débarquer. Je suppose que jusqu’à maintenant il n’avait jamais réalisé que j’avais des seins. D’où le choc. Appelons ça le miracle de la mode. La preuve que la robe de Jodie faisait son effet en quelque sort. S’en est suivit une série de bégayement sans vraiment de sens pendant qu’il essayait de ne pas regarder ma poitrine. Ou mes hanches. Ou quel qu’autre partie de mon anatomie qui ne serait pas mes yeux. Ce qui, je dois le dire, fut un échec tant dans sa tentative de communiquer que dans celle de ne pas me regarder comme un morceau de viande. Mais mes merveilleux atouts mammaires n’allaient pas faire tout le travail. Malheureusement. Il me faudrait un peu plus qu’une jolie robe pour arriver à mes fins. Je dois reconnaitre qu’avoir passé 16 ans à martyriser le mec que tu veux soudainement baiser est un handicap de taille quand arrive le moment de le mettre à poile dans un lit.  Mais il en faut un peu plus pour m’arrêter. Je sais que je réponds rarement aux critères demandé par les normes sociales. Que souvent les gens me prennent pour une inadaptée. La vérité c’est que si l’opinion des gens m’importait, je saurais parfaitement être normale. J’ai suffisamment observé le monde pour savoir comment il marche et comment me fondre dedans. Par conséquence je sais aussi comment manipuler un homme. Si tant est qu’on puisse appeler Luke un homme. Bref ça se résume à : s’assurer que son verre n’est jamais vide, rire à toutes ses blagues, avoir des contacts régulier avec lui (toucher son bras, frôle son dos, laisser son genoux contre sa jambe, etc…) et accessoirement être en capacité de pouvoir tenir une conversation. J’avais clairement un avantage sur les autres greluches qui lui bavaient dessus grâce au dernier point. Je suis doter d’un cerveau c’est surement ce qui fait toute la différence. Et même si le hockey m’indiffère au plus haut point, ça n’a rien de très compliqué, pas très difficile d’avoir une conversation un minimum construite sur le sujet, ou d’ailleurs sur tout autre sujet qui aurait pu être abordé. Alors oui je sais, tu te dis que ma théorie sur la séduction est toute pourrie et assez simpliste. Mais arrêtons de nous voilez la face, il n’en faut vraiment pas plus, l’Homme avec un grand H est un être assez surévalué finalement. L’alcool permet de faire oublier à Luke que je suis la sœur de son meilleur pote et que j’ai passé ma presque entière existence à le traumatiser à chaque fois qu’il venait à la maison et le reste permet de lui faire croire qu’il est intéressant et le centre de toute mon attention. C’est presque chimique à ce niveau là, les contacts et les éclats de rire lui font croire qu’il veut coucher avec moi sans qu’il ne se doute un seul moment que c’est moi qui lui ai mis cette idée dans la tête. E si tu doutes de la véracité de ma théorie sache qu’elle a parfaitement fonctionné, je la considère donc pour ma part comme testée et approuvée.  

Parce que oui, j’ai bien fini dans un lit avec Luke. Et pas pour compter les moutons. Je n’entrerais pas dans les détails même de l’acte sexuel, je ne suis pas là pour écrire une lettre pornographique, et je suis sûr que si le sujet t’intéresse tu arriveras bien à te trouver un dvd qui te fournira en bonus des illustrations. Je conclurais juste en confirmant que les sentiments n’ont effectivement rien à voir dans le plaisir. Puisqu’il est clair que je n’en ai pas le moindre pour Luke. Et que l’expérience n’en a pas moins été agréable. Un sport comme un autre. Je ne pense cependant pas que je vais devenir nymphomane de si tôt, l’effort demander pour arriver au résultat n’en vaut pas la peine selon moi. Je ne nie pas que j’ai apprécié mais de là à devoir supporter les affres de la séduction, non merci.

Voila pour mon dernier bilan, je t’enverrais mes prochaines expériences de vie bientôt, je pense teste les effets de la drogue dans peu de temps. Envoies moi les dernière conneries de ton frère, ça pourra toujours me distraire quelque minute.

A plus Marnie.

Ariel »

 

life experiment N°4 : DEATH

 

Ariel 13 ans – Quatrième rendez-vous chez sa psy depuis la mort de son père. Première fois où elle s’ouvre au dialogue.

« Je sais que je ne suis pas normale. Ça ne me dérange pas. La plus part du temps. Quand je vois les autres je veux dire, ils ont l'air si... inutile. Ils se débattent contre des choses sur lesquelles ils n'ont aucune emprise. Ils gesticulent dans tous les sens, ils sont bruyants, ils pensent être capables de faire la différence, de, réellement, pouvoir changer les choses mais.... au finale ce qu'ils font ça ne sert à rien. ça ne change rien. Mais ils ne s'en rendent même pas compte. Moi je le vois tous les jours et c'est si... évident ! Que je ne comprends pas pourquoi ils persistent et signent dans leur connerie d'essayer. Ils m'épuisent. C'est comme de voir quelqu'un se noyer en sachant qu'il n'y a rien à faire pour l'aider. Parce que même si on arrivait à le sortir de l'eau, il y retournerait la tête la première dès qu'on aurait le dos tourné. Et pourtant... Ils sont si aveugles à tout ça qu'ils ont presque l'air heureux la plus part du temps. Peut-être qu'au finale le monde est moins fatiguant pour eux que pour moi. Mais même si je voulais être comme eux - ce que je ne veux pas - ce n'est pas vraiment comme si j'avais le choix n'est-ce pas ? Je ne peux pas juste décidé de ne plus voir le monde tel qu'il est. Je ne peux pas juste me réveiller et devenir...stupide...

J'ai essayé... J'étais plus petite. Et j'ai décidé d'être "normale". D'être comme tous les autres. De ne pas réfléchir sur tout ce que je voyais, de ne pas dire à tout le monde à quel point tout ce qu'il faisait était inutile... ça ne m'a pas vraiment rendu plus heureuse. Juste un peu plus hypocrite. Un autre mensonge à rajouter aux autres. Je ne suis pas normale. Je ne suis pas comme tout le monde. J’ai fini par me faire une raison. Alors j'ai arrêté. Je ne suis pas normale. C'est comme ça...  

Mais je sais que ma mère voudrait que je sois différente. Elle et Abu. Ça les rend triste, je crois, de me voir comme ça. Et ça leur fait un peu peur aussi je pense. Ils ne savent pas comment me parler, comment créer des liens avec moi. Ils pensent que je suis égoïste. Insensible. Ça ne me dérange pas vraiment. Je suppose que je le suis vraiment par moment. Mais... depuis la mort de papa c'est différent. Abu a décidé qu'il était l'homme de la maison maintenant. Je crois qu'il voudrait prendre soin de moi. Il l'a toujours un peu voulu. Et je n'en ai jamais eu besoin. Même pas maintenant. Maman est en dépression, elle pleure tout le temps. Je suppose que c'est normal. Mais ils voudraient tous les deux que je sois triste. Triste comme eux. Je sais pas vraiment ce qu’ils attendent de moi. C’est bizarre d’ailleurs parce que je sais toujours tout. Mais là… Je ne comprends pas pourquoi ils tiennent tellement à me voir pleurer pour avoir la preuve que je suis vraiment triste. Je crois qu’ils me prennent pour un monstre ou un truc du genre parfois. Ils ne le disent pas mais ils le pensent. C’est parce qu’ils ne comprennent pas. On a toujours un peu peur de ce qu’on ne comprend pas.

Sauf Jodie. Je ne crois pas que Jodie connaisse le concept de peur. Ou de jugement d’ailleurs. Vous m’avez demandé la dernière fois pourquoi j’acceptais Jodie alors que je rejetais tous les autres. J’ai dit que je ne savais pas mais c’est faux. Jodie ne m’a jamais prise pour un monstre. Elle m’énerve. Vraiment. Elle m’épuise à être toujours aussi plein d’énergie et de joie de vivre, à croire qu’on est tous des putains de bisounours. J’ai presque constamment envie de lui dire de fermer sa gueule et la moitié du temps je me demande pourquoi je la supporte. Tout le monde se pose la question. Parce que Jodie est trop gentille pour trainer avec moi et que je suis trop hautaine pour la tolérer. Mais la vérité c’est que malgré tout ça… malgré notre diamétrale différence… J’ai besoin de Jodie. Elle ne m’a pas dit qu’il fallait que je pleure. Elle ne m’a pas dit qu’il fallait que j’en parle. Elle n’a rien attendu de moi. Elle m’a juste acceptée comme je suis. Pas normale. Et peut-être que c’est tout ce dont j’ai besoin en ce moment. Quelqu’un qui ne me regarde pas comme un monstre.

C’était mon père. Il est mort. Et je n’ai pas besoin de pleurer pour prouver à qui que ce soit qu’il me manque. Tant pis si c’est ce qu’on attend de moi. Après tout…. Je suis égoïste et insensible. C’est ce que les gens pensent et ça me va très bien comme ça. »

 

life experiment N°5 : FRIENDSHIP

 

Ariel 23 ans – Entretien avec la psy qui la suit depuis bientôt dix ans. Une des rares personnes avec qui la jeune Dwight excepte de parler d’elle.

« Je me sociabilise. Avant tout débordement d’enthousiasme de votre part sur les progrès que je  fais je préfère vous prévenir tout de suite que ceci est complétement indépendant de ma volonté. Si on me laissait le choix ça serait moi, Jodie, Marnie, point barre. Comme ça l’a toujours été. Mais on ne me laisse pas le choix. Etrangement les gens semblent m’apprécier pour d’obscure raison. Je ne suis pas drôle, je ne suis pas gentille, je ne suis pas aimable, et je passe ma vie à essayer de me tenir à distance du moindre contact humain. Pourtant… les gens continuent encore et toujours à vouloir créer des liens avec moi. Entre Imogène qui s’évertue à me raconter toute sa vie dans les moindres détails et que j’écoute à peine et Eric qui tente toute les techniques connues de son répertoire pour me mettre dans son lit…. J’aimerais bien qu’on me foute la paix. Et s’il n’y avait qu’eux… mais non. L’être humain se déplace en meute et ces deux-là ramènent avec eux d’autre spécimens humanoïdes que je dois supporter. La solution pour se débarrasser d’une partie de ses indésirables serait de coucher avec l’autre retardé. Mais puisqu’il me sert actuellement de cas d’étude pour savoir jusqu’où l’individu mâle est capable d’aller pour s’envoyer en l’air je pense que je vais devoir les tolérer encore quelque temps. Coucher avec Eric ruinerait toute mon étude.

Pour le moment j’ai déjà pu observer que l’attrait du sexe passe avant le concept de fierté, bien que je n’en sois pas encore tout à fait sûr n’ayant pas réussi à déterminer si en temps normale Eric connaissait le concept de fierté. Je vais mener de plus ample recherche sur la question et en attendant je vais m’attaquer à celle de l’intégrité physique.  Je pense réussir à le faire sauter du haut du plongeoir de 10m pour m’impressionner mais je ne suis pas sûr qu’il irait jusqu’à traverser la quatre voies les yeux bandés… Et puis il faudra aussi que j’étudie les capacités du désir sexuel à rendre un individu cultivé. Il doit m’accompagner voir un spectacle de danse contemporaine la semaine prochaine. C’est un début. J’ai toujours pensé que les hormones rendait les abrutis encore plus abruti ce qui en soit était déjà une capacité impressionnante au vu du niveau intellectuel de certain. Mais découvrir qu’ils pourraient à l’inverse leur apporté une ouverture d’esprit…. J’ai peu d’espoir mais l’expérience vaut le coup d’être tentée. »